Je me souviens des fleurs – ou des citrouilles, légumes, fruits… – que je ramenais du marché pour les photographier, le plaisir dans les jambes, bon pas, tête déjà dans les étoiles. Je préparais le plan de travail (en général la table de la salle à manger), je posais ici un miroir, là un verre d’eau. Je plaçais mon modèle, le préparais, le malmenais un peu, ça m’arrivait, c’est vrai, non sans délicatesse, une certaine tendresse. Quoi d’autre que de l’amour, en fait ? Mon appareil muni de son objectif 60mm, parfois posé sur pied, parfois sur des objets hétéroclites superposés. Réglage manuel, jamais de flash. Je visais, concentrée, m’approchais, reculais, mise au point, petite décharge d’adrénaline, shoot. N’ai-je jamais aussi bien regardé que dans mon viseur. Ce n’était plus la fleur que je voyais, c’était l’image que je cherchais, le monde qui s’inventait.

tombée d'Iris origine