Romantisme et fantastique, l’un sans l’autre m’est déjà promesse de rêve, unir les deux comble mes rêves. Les tourments intérieurs ? Qui n’y est pas sujet ? Romantisme, fantastique, deux mots que je n’ai guère délaissés depuis mon adolescence. Je les ai tant creusés et assimilés. Et chaque fois qu’ils réapparaissent dans ma vie, c’est comme un cadeau de l’outre-monde, et je deviens une romantique fantastique. Alors cette exposition de noir, et de blanc pour exulter le noir, romantisme du noir, est un parcours intime où chacun trouvera son centre de gravité. Evidemment le noir a besoin de lumière pour rayonner, et si cette phrase d’Odilon Redon :  « Il faut respecter le noir. Rien ne le prostitue. Il ne plait pas aux yeux et n’éveille aucune sensualité. Il est agent de l’esprit bien plus que la belle couleur de la palette ou du prisme. », si cette phrase ne résonne pas en moi comme elle l’eut fait jadis, je n’en fus pas moins emportée dans cette exposition par les ondes dessinées par les maitres du noir.

PPestR1015_692Goya dont Baudelaire écrivait : « le regard qu’il jette sur les choses est un traducteur naturellement romantique. » C’est avec Les caprices, que Francisco de Goya s’engage sur la voie du fantastique. Quatre-vingts planches représentant les vices larvés de l’homme.PPestR1015_701

Je déambule dans cet univers reconnu et infailliblement envoûtant allant d’estampe en estampe, reconnaissant au passage La mélancolie, de Dürer, ou, comme ci-contre, Le cauchemar que j’ai tant observé, de Laurede (inspiré par l’oeuvre de Johann Heinrich Fussli), tiens, je ne connaissais même pas le nom de l’artiste, le dessin, oui… même en couleur, il reste un cauchemar de cette jeune femme alanguie, prisonnière de ses démons intérieurs.

Errance, spleen, déchéance, auxquels se mêlent les délires, les tourments et fantasmagories. Le fantastique, savez-vous ? Ce petit écart surnaturel survenant dans un quotidien si banalement réel. Hop, le grain de sable dans les rouages de l’intranquillité, et le rêve de s’immiscer dans la réalité.  « La vie est un songe », disait Calderon.

Alors qui inspirent les artistes ? Oh facile, des auteurs parmi les plus grands : Shakespeare, Hugo, Goethe. Excusez du peu. Il y est question de sorcières, de sabbat, de tentation de démons d’apocalypse de femmes nues et échevelées condamnées à l’Enfer…

PPestR1015_706Mais aussi, l’illustration de romans, ainsi une lithographie de Louis Boulanger, Les derniers jours d’un condamné (1830) ramène au cauchemar du condamné du roman éponyme de Victor Hugo paru en 1829 (lithographie) et qu’il faut avoir lu.

PPestR1015_713Tout comme Fortuné-Louis Méaulle, s’inspire aussi de Hugo pour Le Burg et la croix (gravure sur bois)PPestR1015_735

Et comment ne pas parler d’Edgar Allan Poe dont Alphonse Legros illustre fort bien Le puits et le pendule (eau-forte)

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Reste que Gustave Doré est toujours aussi impressionnant (j’ai eu le bonheur de voir une fabuleuse exposition consacrée à l’artiste au Musée d’Orsay, l’année dernière – j’en suis ressortie totalement subjuguée, émerveillée, fascinée… )

PPestR1015_725 Et puis, nous avons un peu commencé par lui, citant ses propos sur le « noir ». Et il faut bien y revenir : Odilon Redon et ses rêves, qui fut surnommé le « prince du rêve ». On est là dans le soleil noir de la mélancolie, des estampes vraiment noires et particulièrement étranges. Hum… à vrai dire, si j’ai beaucoup aimé il y a de cela un temps certain, aujourd’hui, je suis  parfois un peu mal à l’aise devant ses dessins.

PPestR1015_747D’autres artistes comme Grandville, Rops… dont les oeuvres mériteraient largement que l’on s’arrête sur elles…

Et puisqu’il est question d’estampe, vous avez peut-être lu au fil des images que je publie ici, gravure sur bois, lithographie, eau forte… il s’agit de différents procédés techniques pour obtenir une estampe. Si cela vous intéresse d’entrer dans le sujet, vous trouverez ci-dessous trois planches explicatives. Il vous suffit de les agrandir pour tout savoir.

PPestRgsb1015_739PPestRGtd1015_742PPestRL1015_740Je vous rappelle que l’exposition Fantastique, au Petit Palais regroupe deux expositions, l’une sur Kuniyoshi, le démon de l’estampe, et l’autre sur l’estampe visionnaire de Goya à Redon, dont cet article tente de vous donner un aperçu.