SD181115b14h, je fais un nouvel essai. Cette fois, la voie est libre. Libre. Je remonte, je prends ma carte d’identité, mon téléphone, et je pars reprendre possession de ma ville. Besoin de marcher, de sortir, de me sentir là.

Des hommes sortent aussi, mais peu de femmes. Je veux simplement marcher pour desserrer l’en-moi. constater que tout est comme avant. Entendre l’écho de la ville.

On se croirait un dimanche après-midi quand la ville dort.

Au loin, je vois un flot humain descendre vers moi. Des journalistes. Je bifurque et remonte à contre-courant jusqu’à « la rue ». Attroupement, je ne fais en général pas partie des curieux, mais là… étrange sensation d’absence d’agressivité autour de moi, je sors mon vieux téléphone et je…  On vit avec un point d’interrogation qui nous regarde autant qu’on essaie d’en faire le tour.

Mon immeuble était un espace de silence. Tout le monde devait être à bord, mais rien ne le laissait supposer. Je suis sortie, personne, j’ai descendu le grand escalier, personne. J’ai regardé dans les rues, un homme en uniforme intimait à un automobiliste de retourner au garage. Il ne m’a pas vue. J’ai fait marche arrière, j’ai regardé autour de moi, c’est là que soudain, le vertige du vide m’a surprise. Alors je suis remontée, l’attente m’a embrassée, ficelée, injecté son sérum de passivité.

Je n’ai rien entendu que des explosions et des tirs et les voix de mes proches qui me téléphonaient et les cliquetis du clavier qui donnaient des nouvelles aux amies. Et le soleil qui brillait. Je me souviens m’être levée ce matin, avoir pris une douche en me disant qu’il faudra peut-être partir et qu’il fallait se tenir prêt, mais ensuite, j’ai un doute, peut-être que rien n’est vrai dans tout cela ? Alors j’ai pris des photos. Toute ressemblance avec des faits ou des personnes ne serait que pure coïncidence…

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