Il me faut bien l’avouer, les films d’animation (ici il s’agit d’une animation en stop motion, les figurines sont animées image par image) ne sont pas vraiment ma tasse de thé. Et quand les premières images d’Anomalisa sont apparues, je me suis dit que c’était pas gagné. T’as vu les tronches découpées au scalpel ? et voilà que je me braque, j’aime les vrais acteurs, moi. Et puis, je me sens glissée doucement dans l’illusion, faut croire qu’ils sont forts les réalisateurs Charlie Kaufman et Duke Johnson, parce que voilà que je craque aux regards, aux expressions étonnamment vivantes, aux différents plans des scènes… je m’approche (ou bien c’est la caméra), pour mieux regarder ces deux petits points reflets non symétriques dans les yeux, voilà par où ça passe, où ça se passe, du personnage à nous. D’image en image, je dois bien reconnaître, je me surprends d’apprécier ici un geste nonchalant, là des pauses qui en disent long, je me prends à aimer l’animation, et je m’étonne… et puis voilà qu’on chante sous la douche, alors là, toutes les réticences qui me retenaient encore partent avec l’eau du bain. Je m’habitue à ces personnages imparfaits qui se ressemblent tant, je m’interroge sur les voix, je regarde partout, je m’interroge (arrête de penser et regarde le film), je m’imprègne et je me dis que tout ça c’est exactement ce qui convient au film et ce qui me convient au moment où je le vois. Et voilà que je me surprends à être émue devant la nudité du personnage, je me surprends à sourire, et je me dis « c’qu’il est beau, c’qu’il est vrai, c’qu’il est plus beau que vrai » et devant la scène d’amour si réaliste dans ses maladresses, délicatesse, émotion, qu’elle est vivante et belle. Voilà que je me dis que si on me demande qu’elle est votre scène d’amour préférée au cinéma, je répondrai celle d’Anomalisa. Parce que, la sincérité et l’émotion… On y est tellement. Bien sûr, c’est un peu noir comme peut l’être la vie d’un être que la panique à ne plus savoir qui il est, qui ils sont, percute de plein fouet. « Ça ne va pas, non ça ne va pas » Qui ne s’est pas retrouvée avec ces lambeaux dans la tête en ne comprenant plus le monde ? Qui ne s’est pas cherché dans l’autre ? Trouvé puis perdu ? Rien ne va plus, mais il y a ce petit souffle d’air pur, la voix de Lisa dans le regard de Michael, une pureté si ténue qu’elle me fait frémir en bout de chanson, comme un gémir intérieur. Je me dis, elle chante pour elle-même, alors sa voix est au plus vraie de son coeur. C’est ce qui trouble Michael, c’est ce qui trouble. Il nous faut jongler entre ce qu’on voit, ce qu’on entend, ce qu’on ressent à penser en même temps que le personnage, et tout le reste.
Et maintenant, je vais vous dire, ce film je ne serais pas allée le voir si notre célèbre pousseur de cailloux, le bien nommé Sizif ne l’avait conseillé fortement ici. Alors, bien sûr, je me suis renseignée, j’ai écouté La Dispute sur France Culture, mais pour le coup l’émission était un peu floue, un des intervenants défendait le film avec enthousiasme : « un cauchemar éveillé… qui m’a littéralement envoûté. » Envoûté, il y a de ça, n’est-ce pas ? « Un travail photographique magnifique », oui oui. Pendant le générique de fin, je me disais, j’ai adoré, hein, oui, il faut que je leur dise que j’ai adoré. Tout simplement, parce que tout ça, c’est un peu en nous que ça se passe, que ça résonne, que ça parle et que ça chante, que rien n’est idéal. Parce que ça chavire un peu aussi. Et quand vous vous retrouvez dans le métro après le film, vous regardez les gens d’une autre façon avec ce que vous portez de chaud en vous, j’aime quand un film me laisse son aura autour de moi, une sorte d’émerveillement… une sorte d’osmose, un peu de nous dans le film, un peu des personnages en nous… et on se prend encore à sourire de connivence, parce que c’est comme ça.
Ah, oui, j’aime beaucoup l’antiquité japonaise que Michael… enfin, je ne vais pas tout vous dire.
Le synopsis et puis la bande annonce : Michael Stone, mari, père et auteur respecté de « Comment puis-je vous aider à les aider ? » est un homme sclérosé par la banalité de sa vie. Lors d’un voyage d’affaires à Cincinnati où il doit intervenir dans un congrès de professionnels des services clients, il entrevoit la possibilité d’échapper à son désespoir quand il rencontre Lisa, représentante de pâtisseries, qui pourrait être ou pas l’amour de sa vie…
18 février 2016 at 10 h 27 min
Merci d’avoir cité mon ami Sizif et surtout heureux que tu nous décrives ce film si bien, avec tant de justesse et de subtilité. Quant à cette exposition, c’est incroyable à quel point elle répond en écho à ce film justement. Celle-là, je ne la manquerai pour rien au monde. Très bel album de photos en plus.
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18 février 2016 at 10 h 35 min
Et puis le quai Branly est un lieu très agréable, dépaysant et surprenant. Par contre, je n’ai pas pu voir les autres expos temporaires, Anomalisa et Persona prenaient toute la place en moi.
Merci à toi, Francis.
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18 février 2016 at 10 h 44 min
J’aime beaucoup cet endroit aussi. Tu as vraiment bien fait de mettre ce film et cette expo en correspondance, avec toute la sensibilité qui est la tienne, si précieuse !
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18 février 2016 at 13 h 19 min
je déguste……pendant la sieste de mon petit-fils, ds son sud natal……d’abord j’adoooore ton nouveau bandeau qui recèle tellement de cadeauX ( mais je ne dis pas quoi :-) ) car c’est ce que j’ai vu en premier avant de te lire
et là je vais faire une pause avant de lire l’expo car je suis restée scotchée par anomalisa……..rien que le titre, wahhhh…..et puis moi j’aime les films d’animation….bcp…..enfant que je suis avant tout….car les personnages d’animation sont pour moi des acteurs à part entière
merci Evy…..pour *tout* :-)
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18 février 2016 at 14 h 54 min
Te voir déguster de la sorte me ravie, malyloup, et bien contente que tu te sois aperçue pour le bandeau… ceci dit, un oeil comme le tien qui sait voir tous les secrets volatiles de la forêt, ça ne pouvait pas lui échapper.
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18 février 2016 at 15 h 34 min
» … pas vraiment ma tasse de thé… pas gagné… je me braque…je m’interroge (arrête de penser et regarde le film)… Parce que, la sincérité et l’émotion… Qui ne s’est pas retrouvée avec ces lambeaux dans la tête en ne comprenant plus le monde… cherché dans l’autre ? Trouvé puis perdu ? …une pureté si ténue qu’elle me fait frémir en bout de chanson, comme un gémir intérieur…elle chante pour elle-même, alors sa voix est au plus vrai de son coeur.… parce que tout ça, c’est un peu en nous que ça se passe, que ça résonne, que ça parle et que ça chante, que rien n’est idéal…que ça chavire un peu aussi… après le film, vous regardez les gens d’une autre façon avec ce que vous portez de chaud en vous … »
Je te lis, et je navigue entre tes phrases… entre ces élans de belle mélancolie, palpable et dansante…entre ce coeur qui dévore la vie et les heures… pour lui-même…en ne voulant jamais se mentir… ni mentir à la vie… comme ça m’arrive souvent chez toi, j’ai vite eu l’impression de me lire… j’étais en toi, avec toi… Merci d’être là, de prendre le temps de partager tout ça… et cette nouvelle « mise en blog »… c’est beau, c’est tendre… et merci pour cette autre expo avec toi … j’y trouve à regarder ce que je ne vais pas souvent chercher par moi-même… et qui pourtant m’apporte beaucoup…oui, merci ‘vy…
Ah oui, et puis ce personnage que joue Denis Lavant, cette vidéo, fallait le faire quand même… wow…
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18 février 2016 at 18 h 54 min
Et puis, je reviens voir, et je trouve d’autres entêtes… ah, c’était ça l’aléatoire… la binette changeante…
Et dis donc, en passant, tu me la fais encore? Comme l’histoire de la Charlotte, là?
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18 février 2016 at 20 h 10 min
Qu’est-ce que je te fais encore ? L’histoire de Charlotte… Le raté ? mais non, je suis partie pendant que tu étais en train de me visiter, je sais, ça ne se fait pas, mais j’allais pas arriver en retard à mon cours de méditation… Et puis, là, je ne suis même pas chez moi, mais sur un ordi un peu pourri… suis encore de sortie ce soir…
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18 février 2016 at 20 h 15 min
j’me disais aussi…
si tu voyais la lumière ici aujourd’hui…mais tu ne perds rien pour attendre..
et en passant, tu penses quoi des écureuils?
pour le raté… c’est Charlotte qui s’énerve, c’est pas moi… sors, sors, médite ou danse, mais surtout, éclate-toi qu’on s’y berce, c’est fait pour ça les jours que j’me dis, et Charlotte aussi quand même… même si elle est plus impatiente que moi, et souvent plus bavarde… bref, tant que tu danses, moi…
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18 février 2016 at 20 h 25 min
Qu’ils mangent des noisettes et sautent tout le temps. Oups, il est l’heure d’y aller… à plus tard toutes les deux.
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19 février 2016 at 0 h 32 min
Bon, les écureuils j’ai répondu. Si Charlotte continue à s’énerver, je vais ressortir la Pomme, de son placard. En fait, je ne sais pas où elle est, elle n’a pas reparu depuis l’épisode chez qui tu sais… C’est moi qui danse ou c’est toi ? Peut-être nous quatre, en fête.
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19 février 2016 at 0 h 33 min
Tu remarques à quelle heure je te réponds, histoire de…
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19 février 2016 at 0 h 57 min
ouais… mais dis donc, tu cours la galipote ou quoi?
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19 février 2016 at 0 h 59 min
La quoi ?
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19 février 2016 at 1 h 13 min
ah, j’me disais bien… me v’là qu’avec tout ça, j’vais te garder réveillée… voilà quand même pour la galipote…
– Courir la galipote : [Québec] [Familier] avoir des aventures amoureuses.
Étymologie : d’une langue d’oïl. Galipote = ‘course diabolique’
allez… bonne nuit, ma chouette… si tu ne dors pas déjà…
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19 février 2016 at 7 h 11 min
Courte nuit… dors bien, toi.
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19 février 2016 at 17 h 50 min
Au, fait… tu n’aimes pas la binette changeante, Charlotte ? Si ma Pomme te revient pas, dis-le.
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19 février 2016 at 17 h 58 min
Au contraire… j’aime tes millions de visages… oui, oui, j’ai bien écrit millions…
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19 février 2016 at 18 h 01 min
Bien, sinon, j’aurais tout enlevé… Celui d’aujourd’hui est une face de Pierrot lunaire, mais je suis certaine que tu l’avais vu aussi celui-là. Heureusement, ton écureuil me fait sourire.
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18 février 2016 at 20 h 06 min
Tu danses joliment entre mes mots, Caroline. Et j’aime ça.
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18 février 2016 at 19 h 08 min
Quelle joie de retrouver le bocal après quelques travaux de réflexion si subtils! J’en prends plein les yeux, la tête, le coeur, merci!
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18 février 2016 at 20 h 14 min
La joie de vous recevoir, avec vos yeux, votre tête et votre coeur, c’est énorme, ça. C’est moi qui… Henriette, merci.
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18 février 2016 at 21 h 58 min
Vos reportages commencent sérieusement à m’inspirer!
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19 février 2016 at 0 h 34 min
Vous m’en voyez ravie.
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19 février 2016 at 10 h 29 min
D’abord votre compte-rendu du film est excellent et donne l’eau à la bouche. Ensuite, je suis jalouse ! Ah, ces gens qui peuvent aller voir des expos au Quai Branly comme ça, tout simplement ! Moi qui vais si rarement à Paris et si peu de temps, je visite celles qui sont en cours (la dernière, Picasso Mania au Grand-Palais et la fondation Vuitton) sans aller chaque fois dans ce formidable bâtiment dont la scénographie et les pièces me bouleversent tant ! Alors vos photos ! J’en bave, tiens ! et c’est pas beau à voir !
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19 février 2016 at 10 h 44 min
Merci, Anne. Et si je vous disais qu’hier soir j’ai traîné mes guêtres à Beaubourg (nouvelle expo Fromanger) en attendant d’aller au vernissage du Palais de Tokyo vers 22h… un p’tit mouchoir pour essuyer la bave ?
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20 février 2016 at 11 h 49 min
Ca, c’est pour m’achever !
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19 février 2016 at 10 h 30 min
Très jolie aussi votre nouvelle page d’accueil !
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19 février 2016 at 10 h 45 min
Merci, c’est bien de le dire, je me demande toujours si…
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19 février 2016 at 22 h 44 min
Je vais parler avec mon cœur et toute l’hystérie qu’il contient mais: Je dois a tout prix aller voir cette exposition et trèèèèèès vite !!!!!!!!!!! (surtout qu’il ne me reste que trois jours sur Paris)
Ai-je encore besoin de préciser que ta façon d’écrire et de présenter donne envie?
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20 février 2016 at 10 h 55 min
Bonne visite, alors…
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