Jeudi (hier), 9h40. C’est la première fois que j’entre dans la maison de Balzac – sans excuse puisqu’elle fait partie des musées libres d’accès quand on possède la carte Paris-musée – je peux même dire que je regrette encore d’avoir laissé passer l’exposition de Louise Bourgeois : Moi, Eugénie Grandet, dans cette maison des coteaux de Passy. Balzac, pour moi… un des auteurs préférés de ma mère, celui d’un ami qui se livrait à l’écriture et admirait Balzac et Stephen King, et des souvenirs scolaires, et même un prix à l’école, Le lys dans la vallée… Ce jour, j’entre dans l’exposition Balzac et les artistes, mythe et réalité. Une autre première fois pour moi puisqu’il s’agit d’un vernissage presse. Après un accueil chaleureux, je pénètre dans la première salle. Des Balzac partout, sur les murs, sur des socles, de matières et de tailles variées. Une présence, c’est indéniable, et les caricaturistes n’ont pas raté l’aubaine. Une présentation visuelle qui me donne la curiosité d’en savoir davantage. J’aime qu’une exposition commence bien, j’apprécie de me sentir entraînée. Qui est Balzac ? C’est bien la première fois que je me pose la question. Je sais juste qu’il est l’auteur de la Comédie Humaine, vous ne vous rendez peut-être pas compte mais c’est quelques deux mille cinq cents personnages (oui, 2500), une oeuvre d’études aussi bien analytiques, philosophiques ou de moeurs… Jean-Claude Carrière ne dit-il pas que « Balzac est le plus grand scénariste de l’histoire du cinéma » ?
Cette exposition nous parle d’un homme qui travaille la nuit, sur une petite table que vous verrez dans l’album ci-dessous. S’y ajoutait un encrier, des feuilles de papier, une lampe et une cafetière. L’homme travaille longuement : « Hier, j’ai travaillé 19 heures, et aujourd’hui, il en faut travailler 20 ou 22. C’est la copie qui me mène, il en faut 16 ou 20 feuillets par jour, et je les fais et les corrige. » écrit à Passy, vendredi 30 octobre 1846.
Les contemporains de Balzac se nomment Victor Hugo, Théophile Gautier, George Sand, Alphonse de Lamartine, Alexandre Dumas… Si Balzac admire Hugo poète, voilà ce qu’il dit de sa prose : « Je viens de lire Notre-Dame – ce n’est pas de M. Victor Hugo auteur de quelques bonnes odes, c’est de M. Hugo auteur d’Hernani – deux belles scènes, trois mots, le tout invraisemblable, deux descriptions, la belle et la bête, et un déluge de mauvais goût – une fable sans possibilité, et par-dessus tout un ouvrage ennuyeux, vide, plein de prétention architecturale – voilà où nous mène l’amour-propre excessif. » Lettre de Balzac à Samuel-Henry Berthoud du 19 mars 1831. Ah, le bonhomme me plait, même si comme beaucoup j’ai un faible pour Hugo. Ils se fréquentaient et Hugo fut même le dernier visiteur de Balzac lors de son agonie en 1850, et il dira lors de son enterrement : « Voilà l’oeuvre qu’il nous laisse, oeuvre haute et solide, robuste entassement d’assises et de granit, monument ! » Balzac entretient des relations amicales avec George Sand, mais s’il lui trouve du style, il considère qu’elle ne sait pas composer et n’a guère de sens critique.
Vous verrez aussi dans l’album ci-dessous que les hommes célèbres sont les proies des caricaturistes.
Enfin, l’exposition parle du rapport qu’entretiennent les artistes du XXème et XXIème siècles avec l’image de Balzac. Certains comme Eduardo Arroyo ou Martine Martine s’en servent comme exploration de leur propre vie d’artiste.A voir tous ces portraits, cet intérêt allant parfois jusqu’à l’obsession de représentation, je me suis promis de lire quelques uns des ouvrages de cette Comédie Humaine sous laquelle j’ai peut-être ensevelis un peu trop vite l’auteur.(si vous trouvez les images trop petites, vous savez que vous avez la possibilité de les agrandir)
Vous pouvez voir l’exposition Balzac et les artistes, Mythe et réalité, jusqu’au 02 octobre 2016. Informations à la Maison de Balzac
Je remercie l’agence Pierre Laporte Communication de m’avoir invitée à mon premier vernissage presse, d’une façon très sympathique qui plus est.
17 juin 2016 at 17 h 31 min
On étudie généralement Balzac à l’école, et malheureusement on s’en dégoûte alors que c’est un grand auteur …
Merci pour la découverte des portraits de Martine Martine, j’aime bien !
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17 juin 2016 at 19 h 20 min
J’aime bien aussi.
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17 juin 2016 at 17 h 42 min
Et bien moi je n’y suis jamais allé… Merci pour cette visite et comme toujours superbes photos… Bravo ! Tu es vraiment douée…
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17 juin 2016 at 19 h 23 min
Merci de suivre mon blog, Goran.
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17 juin 2016 at 20 h 40 min
« J’aime qu’une exposition commence bien, j’apprécie de me sentir entraînée…. »
Quiconque lit de tels mots doit en comprendre que celle qui les a écrits est une amoureuse des expositions. Qu’elle les aime comme on aime un vin, un paysage, faire de la route, faire l’amour. Bref, qu’il y a non seulement de l’effervescence chez l’auteure, mais aussi une grande ferveur…
Et maintenant, pour mes impressions…
…d’abord, sur la ténacité de l’homme…. cette assiduité, toutes ces heures à écrire chaque jour et à se corriger… j’aime entendre, moi qui si souvent fais face à des murs… que l’ouvrage porte des fruits… qu’on ne remet jamais à tort son ouvrage sur le métier… qu’on n’arrive à rien sans travail assidu… ou à beaucoup moins, du moins…
et…
…ô comme on voudrait parfois, comme Hugo, avoir un Balzac dans sa vie, quelqu’un ou quelqu’une de cette trempe qui vous considère assez pour vous dire les choses… même par jalousie, si tant est que c’en fût…
… et aussi un Balzac qui dit de George qu’elle a du style mais ne sait pas composer… ayoye… je l’aurais détesté, mais sans doute, eus-je été George, l’aurais-je aussi remercié, consciemment ou pas, de me confronter à la force… et à la mienne par ricochet… de jeter une lumière brute… qu’elle fusse ou non issue d’une misogynie — puisque tout ça, de toute manière, donne à penser, à réfléchir, à user de son intelligence, et à se dépasser…
…bref, n’a-t-on pas souvent l’impression — quelle que soit l’époque — que les gants sont trop blancs, que les fleurs sont plastiques, voire artificiellement parfumées… et qu’un peu de ronces, juste assez, quelques douces égratignures, stimuleraient peut-être l’esprit… et puis, n’est-il pas vrai que « ce qui ne tue pas rend plus fort »… allez allez, entendons-nous, je ne suis pas en train ici de faire l’apologie de la violence… il y a une différence entre une épine de rose et un poignard…
…enfin, après ce discours pompeux mais non moins senti… que j’ai rédigé, disons-le quand même, avec un certain sourire… je continue d’espérer qu’un jour, ma chère Evelyne, j’aurai la chance d’entrer avec toi sur les lieux d’une exposition, n’importe laquelle, une que tu aimeras de préférence… sinon je te suivrai à une deuxième, une troisième… juste pour t’entendre dire, te voir regarder… et avec un peu de chance, t’y voir faire la puce…
merci ‘vy… c’est vrai que t’es douée…
(zéro fleurs de plastique)
* L’interjection ayoye (« aïe ») constitue une expression familière et particulière au Québec…
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17 juin 2016 at 22 h 41 min
je souris car j’adore george et suis même allée mettre mes pas dans les siens, il y a longtemps….et j’aurais détesté balzac pour ses mots sur elle……mais oui, ce qui ne tue pas rend plus fort :-)
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18 juin 2016 at 8 h 16 min
Il faut savoir être Balzac, ce n’est pas donné à tout le monde. Et puis surtout savoir manier l’épine de rose. Mais je suis fort en accord avec toi. Quelques ronces sont parfois une belle preuve d’estime.
J’aime partager les expositions avec les gens que j’aime, c’est un fait, alors un jour, j’espère, oui, on se fera une débauche d’expos, mais je suis certaine que je t’écouterai et te regarderai tout autant que toi moi, nos mots et nos regards se nourrissant les uns les autres. Les puces seront de sortie !
« ayoye » j’aimerais bien ne pas l’oublier celui-là. Merci, Caroline.
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21 juin 2016 at 7 h 34 min
Quel belle analyse si bien commentée, si bien écrite, Caroline. Evidemment, nous n’avons pas affaire à n’importe qui. Car oui, ‘vy de son œil pénétrant, photographie dans le geste et dans le cœur, avec bienveillance et acuité. Et la provinciale que je suis met ses pas dans les siens pour sentir les grands moments dans la capitale et les humeurs du temps au travers ces reportages pointus non comme des scalpels mais poncés à l’émeri, délicatement.
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21 juin 2016 at 17 h 58 min
Provinciale de Louvain-la-Neuve, tout de même, alors tu parles que mes pas s’en réjouissent, d’ailleurs ils avanceraient pas pareil mes miens pas s’il n’y avait pas tous ces pas de vous tous dans les miens. C’est donc un peu vous, Anne, Caroline, et tous les autres qui me faites avancer. Ça muscle les cheville aussi, faut bien dire…
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17 juin 2016 at 22 h 35 min
eh, eh, tu nous raconterais comment tu te retrouves invitée à un vernissage presse? si c’était indiscret tu ne l’aurais pas mis dans ton article, me dis-je :-)
j’ai passé en revue les livres de balzac et même si j’en ai lu beaucoup, je m’aperçois que beaucoup me sont inconnus et ça donne envie de s’y plonger :-)
encore une victoire de ‘vy ;-)
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18 juin 2016 at 8 h 24 min
Simplement par un mail tombé du ciel. D’ailleurs, c’était davantage mon blog que moi qui était invité, mais comme il ne se déplace jamais sans moi… Une surprise, tu penses, j’ai encore fait la puce, c’est peu de le dire… hem, bon, on ne dira pas tout de mes débordements parfois exubérants…
Ah tant mieux, oui, lisons Balzac… Tu me fais plaisir, maly.
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18 juin 2016 at 10 h 22 min
super!!!!! j’espérais cette réponse! à savoir que c’était ton blog qui était concerné par cette invitation, tant ton travail de ‘vulgarisation’ est énorme! bravo, Evy! ;-)
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18 juin 2016 at 11 h 05 min
Merci, maly, les oiseaux en sont tout ébouriffés d’émoi.
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18 juin 2016 at 8 h 14 min
Trop alléchée…passage éclair pour humer en attendant le temps de déguster.
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18 juin 2016 at 8 h 29 min
« alléchée », « humer », « déguster », vous me mettez en appétit.
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18 juin 2016 at 9 h 29 min
Du moment que la critique est constructive… Vraiment intéressant cet angle sur Balzac et son acharnement au travail ;)
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18 juin 2016 at 9 h 41 min
C’est juste, la critique constructive est une aubaine.
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18 juin 2016 at 9 h 48 min
‘Vy come VIP maintenant… Et ils ne doivent pas regretter de t’avoir invitée, car tu mets cette exposition en valeur et quiconque te lit doit avoir envie d’y aller. J’ai lu assez peu Balzac (deux ou trois romans). C’est souvent le sort infortuné et ingrat des grands classiques étudiés à l’école, qui a surtout le don de t’en dégouter jusqu’à un age fort avancé.
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18 juin 2016 at 10 h 07 min
Mais quand on atteint cet âge… de sagesse, on se rend compte combien les classiques nous disent l’humain en nous en l’autre, et qu’ils peuvent alors nous être suffisants. J’envisage tous les ans de les relire (j’ai même commencé). Quand la maison sera habitable (un jour, me promet-on), nombre d’entre eux y trouveront place. Je ferai la lecture aux crapouilles, je rêverai, je méditerai, j’invoquerai, je vivrai entre leurs pages le reste de mon âge… y a pas que Sisyphe qu’il faut imaginer heureux, Ulysses aussi comme l’écrivait ce cher Joyce. En attendant, j’ai encore quelques sauts à faire. Merci, Francis.
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18 juin 2016 at 10 h 26 min
Il faut s’imaginer soi-même heureux.
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18 juin 2016 at 11 h 05 min
Et notre imagination est grande, pour sûr !
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18 juin 2016 at 10 h 21 min
Merci! La connaissance humaine de ce grand monsieur Balzac n’a jamais autant titillé ma culturiosité qu’en lisant ce bel article. Les photos sont excellentes, tout cela donne très envie! Et je vais immédiatement me renseigner sur cette Martine Martine….
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18 juin 2016 at 11 h 02 min
Merci pour ce commentaire enthousiaste.
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18 juin 2016 at 15 h 38 min
Une joie de suivre vos pas, vous laissez l’espace pour que chacun mette les siens après vous.
Je n’en connais qu’une partie mais j’admire infiniment l’œuvre de Balzac.
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18 juin 2016 at 22 h 46 min
Merci pour cette belle image.
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19 juin 2016 at 16 h 20 min
J’ignorais que la maison de Balzac existait et qu’elle était visitable ! Même si Passy c’est un peu loin pour moi…
Balzac est un de mes auteurs préférés, mais j’ignorais qu’il était l’auteur de « quelques 2500 » ouvrages (moi qui pensais en avoir lu une bonne partie avec une vingtaine… !).
Il avait une manière de percer à jour les hommes et les sentiments qui, je trouve, traverse les siècles. Il me semble qu’il avait une sensation aiguë du fonctionnement des êtres humains.
Si je ne me trompe, cette créativité et capacité à ressentir les choses aussi vivement était en partie due à sa bipolarité…
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19 juin 2016 at 19 h 55 min
2500 personnages ai-je écrit, et non ouvrages. J’ignorais qu’il était bipolaire.
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20 juin 2016 at 7 h 56 min
ah, mes yeux et mon cerveau me jouent des tours après tant d’heures passées devant l’ordinateur…
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20 juin 2016 at 10 h 58 min
Les miens me jouent parfois le même genre de tours.
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19 juin 2016 at 23 h 05 min
Merci, ‘vy, de cette invitation : 2500 personnages ! J’ai du mal à imaginer la difficulté qu’il doit y avoir à les articuler, à les coordonner. Et je ne me souviens plus très bien de cette articulation : les liens entre les personnages des différents tomes de la Comédie humaine me semble plus lâche que dans les Rougon-Maquart
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20 juin 2016 at 10 h 56 min
J’aurais tendance à penser la même chose que vous, que ce soit à propos de l’articulation d’un si grand nombre de personnages ou de leurs liens comparés à ceux de l’oeuvre de Zola.
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