Et puisque aujourd’hui c’est farniente… dormons voulez-vous ?
 *
– Excusez-moi vous marchez sur vos mots. Tenez, je vous les rends.
– Vous les avez lus ? Vous n’aviez pas le droit.
– Vous êtes un peu chez moi, vous savez.
– Je ne sais pas où je suis.
– Chez moi.
– Il fait tout noir chez vous. Et puis un peu froid.
– Vous n’êtes pas très aimable.
– Et pourquoi je serais aimable ? On se connait ? Vous me piquez des mots qui ne vous sont pas destinés et je devrais être aimable.
– Vous souhaitiez l’être davantage lors de notre dernière rencontre.
– Vous êtes qui ?
– Qui êtes-vous, vous ?
– Hé, attendez, vous avez raison, je suis qui ?
– Vous ne vous rappelez pas ? Nous nous sommes cognés l’un à l’autre dans le métro, c’était sur la ligne 4… vous m’avez aidée à me relever, j’ai ramassé votre lettre et j’ai oublié de vous la rendre.
– Et elle dit quoi cette lettre ?
– Figurez-vous que je ne l’ai pas très bien lue. Vous n’en avez pas une petite idée ? C’est vous qui l’avez écrite.
– Il fait sombre chez vous. Je n’arrive pas à éclaircir mes idées. Vous ne pourriez pas allumer ?
– Si vous voulez.
– Mais… je suis nu !
– Totalement.
– Comment avez-vous osé me déshabiller ?
– En général quand on pénètre mes rêves on arrive sans vêtement.
– Vos rêves ? Un cauchemar, oui.
– A qui la faute ?
– C’est quoi cette histoire de rêve ?
– Peu importe.
– La lettre… vous l’avez lue n’est-ce pas ?
– Un peu, c’est vrai.
– Et ce que vous y avez lu vous casse un peu l’atmosphère.
– Vous vous êtes imposé et en plus vous m’ennuyez. J’en baillerais si je ne dormais déjà.
– Vous aussi vous m’ennuyez. Réveillez-vous, je sortirai de votre vie.
– Si c’était si simple. Il faut attendre que le réveil sonne.
– Ce sera long ?
– Vous savez le temps dans les rêves… ça peut durer une éternité. D’ailleurs peut-être me suis-je réveillée et que le rêve continue.
– Hum… vous êtes comment ?
– A votre goût certainement.
– Comment pouvez-vous en être sûre ?
– Vous n’avez pas arrêté de vous coller à moi dans le métro et de balader vos mains sur mes fesses. C’est en vous donnant un coup de pied que je suis tombée.
– Mais je vous ai aidée à vous relever.
– En me pelotant les seins.
– Alors qu’est-ce que je fais là si je suis si ignoble que vous semblez le dire.
– Si je savais. Les rêves nous mènent où ils veulent.
– Les rêves signifient toujours quelque chose. Avouez que ça vous a excitée, alors vous rêvez de moi.
– Attendez la suite avant de vous glorifier. Vous avez continué à me suivre. On s’est un peu battus. Et vous avez dégringolé les escaliers. Vous êtes un peu mort depuis.
– Quoi ?
– Maintenant si vous voulez sortir de mon rêve, je peux vous rendre à votre corps.
– Vous voulez dire que si je sors d’ici, c’en est fini de moi ?
– C’est bien possible. A moins que quelqu’un d’autre rêve de vous.
– Qui ? Je n’ai aucun souvenir…
– Normal, ici vos souvenirs ne serviraient à rien.
– Je… vous pourriez me garder un peu ? Juste le temps que de me retourner. Dans le fond, sans mes souvenirs, je suis quelqu’un d’autre, et pas le sale type que vous avez tué.
– Je ne vous ai pas tué. C’était un accident.
– Vous êtes un peu responsable.
– C’est trop facile. Et si je me réveille et que je ne vous retrouve pas à mon retour.
– Pensez à moi. Je finirai bien par réapparaître.
– Comme vous y allez. Vous êtes devenu une obsession depuis l’accident, je pense tout le temps à vous. Je n’avais pas l’intention de vous tuer.
– Ah vous voyez, vous le dites, vous m’avez tué. Votre petite conscience a du mal à encaisser…. Qu’est-ce que c’est ?
– Le réveil.
– S’il vous plait… me lâche pas, pense à m………..
 *
– Héloïse… HéloÏse, réveille-toi. Allez…. Comment vas-tu ce matin ? Au moins, tu as dormi, tu as l’air reposée.
– J’ai rêvé de Mathieu.
– Tu m’étonnes, tu as encore lu sa lettre cette nuit. Ecoute, tout était fini entre vous, tu n’as rien à te reprocher.
– Il est mort.
– Pas toi. Allez ma vieille, lève-toi. La vie continue.
– …
– Héloïse, te rendors pas.
– Juste un peu, le temps de prendre un rendez-vous.