A l’évidence ce que je touche se fige comme du sang cailloté, seule l’entropie se la coule douce, ce qui est plutôt rassurant, convenez-en. Rien de telle qu’une petite perf de confusion de temps à autre pour vous fouetter les neurones engourdis. On verse ensuite dans le jeu de la tentation du grand nettoyage intime. Et me voilà acharnée à grattouiller mes rêves façon toilettage intensif pour en desquamer la peau tavelée, visiblement ils auront poussé dans un champ de mines déconfites hydratés aux acides rêvicides, les voilà écorchés, dépiautés, des rêves aux airs de méduse, gélifiés de la chair, flasques du contenu, si on n’y prenait garde ils injecteraient leur dégénérescence au sein de l’imagination. Passe pour les rêves, ils n’étaient plus qu’épaves échoués au milieu d’un océan d’incertitudes. Pas de quoi fouetter un chat. La vie n’étant qu’un songe, il suffit de s’y abandonner pour devenir un rêve soi-même, ce que je fais très bien, ou très mal, chacun aura son opinion, du moins ce que je fais le mieux. Voyez plutôt.
Le roulement des mois, le temps d’une révolution, a tissé une incidence à partir d’une pelote emmêlée de oui de non et même si les amarres ont soudain lâché sous l’impulsion d’une lame de fond surgi d’un angle que l’on croyait mort, petit à petit la providence s’est remise au travail. Je ne peux nier les adhérences qui pendouillent autant à mon corps qu’ont damné les jeux du hasard que jamais un coup de dé n’abolira*, qu’à mon esprit rebelle. Je ne peux m’extraire d’un destin dont les lignes s’inscrivent dans le livre des futurs conjugués à l’impératif. Qu’il soit fait selon les caprices de la vie puisqu’on ne peut se défiler, être ou enraciner dans le quoique je pense, quoique je fasse pour m’en extraire, pour tenter de détourner les flots poisseux et insidieux courant le long de mes jambes comme des lianes joueuses en mal d’arabesques. Et là, en pleine lumière, je n’ai pu me soustraire à la curiosité d’approcher mon museau de la cotonnade pansue et pendue comme un filet attire-matière. L’aurais-je tant émue ? me demandai-je, avant de comprendre qu’elle avait laissé négligemment trainer ses mues dans les cordages d’un vestibule peu enchanteur. Comme autant de linceuls qui promettent de s’ajuster à mon corps, ai-je pensé… pesé le pour le contre le point de fuite en ligne de mire. Tout vous ramène au centre, autant dire dans les marges de l’impensable. Et pourtant. Je la devine, patiente, quelque part dans l’obscurité, elle m’observe, me voilà en pleine crise de parano, vous dites-vous pour vous rassurer. Cependant qu’en elle s’échafaude le gibet, pointant l’inéluctable dard de Damoclès qui fait de moi la proie consentante et consternante d’un irrémédiable cheminement. Mais si elle croit que je lui fournirai la corde pour me pendre…
Cette maison sise en Cise près de l’allée des Rêves – ça ne s’invente pas -, les tisseuses y sont déesses de céan. Alors moi, m’incruster dans leur nuit ? Plutôt conter mes jours à la lune, les hurler à califourchon sur le dos d’un balai à moteur, ce ne seront qu’aberrations gravées là encore sur le fil tendu de mes divagations, irritations ? culbutations… fragmentation… extrême onction. Fi de toutes ces captations sauvages et frauduleuses, il ne sert à rien de vouloir retarder l’échéance. Vous ! oui, vous, choisissez ! une nuit ? un jour ? une heure, peut-être, je baisserai la garde et je m’endormirai. Et c’est à peine si je sentirai le fil léger qui me liera à ses futures intentions en passant, repassant comme autant de liaisons infimes et non moins dangereuses qui peu à peu emmailloteront mon gisant de ses assemblages consciencieux de bourreau travailleur. Contemplative de la dextérité et ficelée par les oeuvres filées en advenir filiales, mon corps surpris dans les rais d’une féconde éternité s’ouvrira à l’ensemencement. C’est clair, c’est net, pas de faux-fuyant. En mon ultime lucidité je penserai à Louise et à nos mères, avant d’officialiser ma chair comme une terre d’asile ouverte aux grâces d’une nouvelle genèse. Je me vois déjà en cocon incongru enfilé dans une incontinence luxuriante, mon moi accompli, suintance suprême d’un continent nouveau devenu terreau des engendrements infinis. Fin.
4 novembre 2015 at 9 h 28 min
Chemin buissonnier de tes mots semés comme le petit poucet pour ne pas se perdre dans cette allée des rêves, bordée d’arbres que l’on croirait issu d’un film de Tim Burton, tant ils paraissent animés d’humanité, majestueux et bienveillants.
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4 novembre 2015 at 9 h 54 min
C’est vrai qu’ils ont un aspect un burtonesque mes arbres. Du coup je me suis mis la musique de Danny Elfman, l’intro d’Edward Scissorhands qui me fait toujours le même effet hypnotique surtout si je la met en boucle, on laisse flotter, on baisse un peu la lumière et les arbres s’animent, alors moi, je m’élève dans les airs et je danse avec eux.
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4 novembre 2015 at 9 h 56 min
Un grand compositeur de musique de film, en effet ! Et un film culte, sans doute dans mon top 10.
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4 novembre 2015 at 10 h 03 min
Je l’ai jamais vu, en fait. Me suis juste enivrée de la musique (elle accueillait mes visiteurs sur mon premier site que j’avais fait avant le nouveau siècle).
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5 novembre 2015 at 16 h 41 min
Déborde, rivière, et je suivrai tes eaux, rassurée. Qu’elles coulent vivement, librement, doucement, follement, violemment même, tant qu’elles seront poussées par les souffles de ton monde.
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5 novembre 2015 at 19 h 09 min
Les souffles de mon monde… il faudrait que je te dise comme mon souffle s’est empli d’amour aujourd’hui. Il faudrait que je trouve les mots pour le dire… il faudrait que je partage ça.
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9 novembre 2015 at 14 h 21 min
je trouve qu’une de mes photos d’hier fait écho à ce texte et à ‘tes’ arbres que je découvre aujourd’hui ;-)
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